lundi 18 décembre 2017

La gauche espagnole et la question catalane, par Jaime Pastor

« L’expression politique de l’identité catalane est trop persistante et intense pour s’évanouir dans l’anonymat d’une polis unique et, en démocratie, une fois brisé les liens de la peur, le projet unitaire de l’Espagne présente d’autres faiblesses qu’il convient de ne pas agiter (Pays basque, Galice…). » Ce diagnostic d’un ancien ministre socialiste de la justice, Francisco Caamaño, publié dans la présentation d’une anthologie récente établie par Daniel Guerra, El pensamiento territorial de la Segunda República española (Athenaica, 2017), synthétise le constat d’échec historique du nationalisme espagnol dominant non seulement sur la question catalane, mais aussi en ce qui concerne son projet d’assimilation de la diversité nationale et culturelle au sein de l’Etat espagnol. 

En effet, ce nationalisme, représenté principalement par le système du tripartisme du régime monarchique [PP, PSOE, Ciudadanos-C’s], se trouve face à un double problème : trouver une réponse à cet échec autant en ce qui concerne son rapport avec un large secteur de la société catalane que face à la réalité plurinationale toujours plus visible. Cette réponse, si elle se veut démocratique, impliquerait l’acceptation d’un traitement d’égal à égal avec la Catalogne (c’est-à-dire, respecter son droit au divorce). 

lundi 27 novembre 2017

Une pax russia pour la Syrie , par Francis Sitel

A Sotchi, en bord de mer Noire, Poutine est à la manœuvre. Avant le sommet tripartite Russie-Iran-Turquie, il a convoqué Bachar al-Assad pour une « réunion de travail » qui s'est tenue le 20 novembre. Le même Bachar al-Assad était déjà sorti de Syrie une première fois pour un tête-à-tête avec Poutine en octobre 2015. C'était un mois après le déclenchement de l'intervention militaire russe directement sur le terrain. Il s'agissait alors de porter secours à un régime menacé d'effondrement. 

Deux ans après, suite à cette guerre prise en mains par les Russes, les Iraniens et les diverses milices affidées, le rapport de forces est inversé. Toutes ces actions militaires sont appelées « guerre contre le terrorisme ». Pour les Ocidentaux, est visé Daech. Pour Poutine et al-Assad, il s'agit prioritairement des opposants au régime syrien. 

dimanche 29 octobre 2017

Catalogne : “Défendons la République catalane et ouvrons le processus constituant”, par Anticapitalistas

Déclaration d’Anticapitalistes (section catalane de la IVe Internationale). 

Aujourd'hui le Parlement a approuvé le fait que la Catalogne devienne une République indépendante et l'ouverture d'un processus constituant fondé sur la volonté du référendum du 1er octobre. Nous soutenons et saluons cette décision, mais n'avons pas convaincu l'ensemble du bloc démocratique catalan. 

La rupture avec le régime était une étape nécessaire pour que le 1er octobre soit irréversible. Cependant, il a manqué une main gauche pour intégrer des sensibilités non indépendantistes, quelque chose qui doit être inclus dans le processus constituant. 

En même temps, le Sénat a confirmé l'application de l'article 155, le coup d'état à la souveraineté de la Catalogne. Le défi à l'ordre constitutionnel et au Régime de 78 vit maintenant son apogée avec la proclamation de la République catalane. 

mardi 17 octobre 2017

Déclaration sur la crise coréenne, par la Quatrième Internationale

I. Avant que n’éclate la présente crise coréenne, les tensions politiques et militaires étaient déjà vives en Asie orientale entre la Chine, le Japon et les Etats-Unis. A l’occasion du conflit Washington / Pyongyang, elles atteignent maintenant des niveaux inégalés depuis très longtemps et ont déjà des implications profondes dans la région. 

Elles renforcent les dynamiques de militarisation, confortent les courants et régimes de droite nationaliste (notamment au Japon), réduisent la capacité d’action diplomatique autonome de la nouvelle présidence sud-coréenne, placent sous une pression accrue les mouvements citoyens antimilitaristes et pacifistes. L’impérialisme états-unien a pu reprendre l’initiative en Asie orientale, à l’encontre de la Chine. Il envoie ainsi un message à tous les pays de la région. Il rappelle en particulier à Manille que l’on ne change pas d’alliances comme de chemise, alors que le Pentagone, en fonction des accords existants, a apporté un soutien multiforme à l’armée philippine dans le conflit qui l’oppose à Marawi aux groupes djihadistes. 

vendredi 6 octobre 2017

Etat espagnol-Catalogne. Communiqué d’Anticapitalistas suite au référendum du 1er octobre


1° Le référendum qui s’est tenu le 1er octobre en Catalogne est un événement qui met à l’ordre du jour une série de questions fondamentales. La répression sauvage du gouvernement du Parti populaire (PP) et des appareils d’Etat est la démonstration d’un projet autoritaire incapable de répondre de manière civilisée aux revendications démocratiques des gens. Sa propre image que diffuse ainsi le gouvernement Rajoy, reprise par les médias du monde entier, nous renvoie aux temps obscurs du franquisme tardif. Tout démocrate réel ressentira de la honte et de l’opposition devant les images de la police frappant des personnes qui cherchaient à exercer leur droit de vote ou celles de réquisition des urnes. Nous condamnons les agissements du gouvernement et les appareils de l’Etat et nous communiquons notre sympathie aux centaines de blessés, parmi lesquels des militant·e·s d’Anticapitalistas.

2° Le peuple catalan a démontré, autant lors de la journée du 1er octobre qu’au cours des dernières semaines, une volonté collective et une capacité d’auto-organisation énorme.

jeudi 5 octobre 2017

Appel pour la Catalogne. Soutenons le peuple catalan, par la 4ème internationale


Faisant suite au référendum du 1er octobre en Catalogne et à la victoire du Oui à l’indépendance de la Catalogne, en dépit des grandes difficultés légales, judiciaires et policières imposées par le gouvernement du Parti Populaire, la grève générale du 3 octobre lancée par la gauche syndicale (principalement suivie dans l’administration, le transport et la paysannerie) et l’arrêt de l’activité nationale réalisé par d’autres couches de la population (avec des lock-out dans des petites et moyennes entreprise protestant contre la répression) ont été un succès. Le premier résultat est une victoire du mouvement populaire et un échec du gouvernement de Rajoy qui n’a pas pu empêcher ces deux grandes expressions du mouvement.

Une révolution démocratique avec un soutien social massif au sein de l’Union Européenne a été initiée. Cela renforce les possibilités d’avancer vers la République catalane. Un tel objectif exigera un degré supérieur d’auto-organisation populaire et la réalisation d’un processus constituant capable de freiner la contre-révolution annoncée par le discours du Roi d’Espagne Felipe VI, la nuit dernière.

mardi 3 octobre 2017

Portugal : un pays un peu plus tranquille après les élections municipales, par Francisco Louça (Bloc de Gauche)

Jerónimo de Sousa, un chef du PCP, avait raison lorsque dimanche matin il a suggéré la prudence au sujet des lectures nationales des élections municipales. Si toutes les élections mesurent la température et les rapports de forces, chacune le fait avec ses particularités : dans les municipalités, on mesure les pouvoirs et les forces locales qui comptent pour les citoyens, les partis et l'avenir immédiat. 

Huit points pour analyser les résultats : 

Tout d'abord, la réduction de l'abstention est un bon signe, mais elle est encore trop grande et il y a toujours de nombreuses larmes de crocodile. Les listes électorale n'ont pas été mises à jour, ce qui surestime l'abstention, et le système politique n'a pas été en mesure de créer la confiance et la mobilisation que la démocratie exige. 

dimanche 17 septembre 2017

Etat espagnol-Catalogne. D’un «dommage irréparable» au 1er octobre par Teresa Rodríguez et Miguel Urbán

«Afin d’empêcher un “dommage irréparable”, le PP saisit la Cour constitutionnelle [Tribunal constitutionnel] sur le Statut de la Catalogne». Voici le titre du quotidien El País le 1er août 2006 au sujet du recours présenté par les dirigeants de ce parti (Parti populaire de Mariano Rajoy) au Tribunal constitutionnel contre la réforme du Statut qui avait été adoptée au Parlement catalan avant d’être partiellement amputée par le Parlement espagnol, puis finalement approuvée par référendum en Catalogne. 

La résolution du Tribunal constitutionnel annulera presque quatre ans [2010] plus tard 14 articles du Statut de la Catalogne [statut catalan] et en interprétera de manière restrictive 27 autres. Rajoy, Acebes [ministre de l’intérieur entre 2002 et 2004, puis président du PP entre 2004 et 2008] et Sáenz de Santamaría [actuelle vice-présidente du gouvernement], bien qu’ils ne furent pas pleinement satisfaits, applaudirent cette décision alors que José Luis Rodríguez Zapatero [PSOE], alors président du gouvernement [entre 2004 et 2011], constatait que ce dénouement signifiait «la fin de la décentralisation politique». 

lundi 11 septembre 2017

Notre Révolution russe, par Charles Michaloux et François Sabado

Cet article, retour critique sur les leçons de la Révolution russe, est écrit par deux responsables français de la 4ème internationale, Charles Michaloux, adhérent d'Ensemble!, et François Sabado, adhérent du NPA. Il représente une réflexion et une inflexion importante de la 4ème internationale sur le bilan de la révolution majeure du 20ème siècle et, à ce titre, intéresse toutes celles et ceux qui ne renoncent pas à changer le monde. Cet article est paru initialement dans l'excellente revue ContreTemps.


Le centenaire de la Commune de Paris, en mai 1971 à Paris, fut marqué par un grand défilé où l’énergie toute proche de Mai 68 flottait dans l’air du printemps parisien devant le cimetière du Père-Lachaise et son Mur des Fédérés. C’était la célébration d’un événement fondateur mais conclu par une défaite. Le souvenir du massacre des Communards par les Versaillais et la bourgeoisie parisienne donnait certes toute sa gravité à ce centenaire ; il était pourtant empreint d’une espérance joyeuse pour la jeunesse qui marchait ce jour-là.

mardi 22 août 2017

Venezuela. Contre l’interventionnisme et les menaces militaires impérialistes, par Marea Socialista

Le président des Etats-Unis, Donald Trump, vient d’annoncer [vendredi 11 août] qu’il considère recourir à « l’option militaire » pour expulser le président Nicolás Maduro du pouvoir. 

La menace d’une possible opération militaire contre le Venezuela a été précédée de l’adoption de sanctions économiques unilatérales. Il semble peu probable qu’il y ait une invasion militaire directe ; mais le gouvernement Maduro est soumis à un tel chantage pour qu’il cède plus. Il est toutefois évident qu’il y a une escalade face à un acteur qui apparaît comme gênant. 

Ce que Trump souhaite vraiment écraser, c’est l’impertinence de la révolution bolivarienne. 

Marea Socialista s’oppose fermement aux menaces militaires de Trump, à toute ingérence du gouvernement d’Amérique du Nord, ainsi qu’aux sanctions économiques. Nous serrons les rangs aux côtés de notre peuple vénézuélien indigné et valeureux, faisant appel à la lutte indépendantiste victorieuse qui fit de nous une nation libre. 

vendredi 11 août 2017

Etat espagnol. De la caste au gouvernementalisme, de la «cal viva» au gouvernement alternatif, par Manuel Gari

Les trois mouvements tactiques qui sont apparus au sein de Podemos au cours de la troisième semaine de juillet obligent à réfléchir à la nature de la plaque tectonique sur laquelle se trouve Podemos en tant que force du changement. Je fais ici référence à ceux qui sont liés à l’hypothèse de l’entrée dans des gouvernements [de régions autonomes] aux côtés du PSOE. Sur ce sujet, le nombre d’articles et de commentaires est incalculable. Un grand nombre d’entre eux de nature tactique et seulement quelques-uns de portée stratégique, alors que ce thème requiert cette dimension. Au nombre de ceux qui règlent la focale sur la stratégie, il convient de souligner le bon article des députés de Podemos à l’Assemblée législative de la Communauté autonome de Madrid, Isidro López et Raúl Camargo, intitulé L’erreur historique des accords de gouvernement avec le PSOE et traduit sur ce site.

La science politique traditionnelle peut considérer qu’il est naturel que deux partis conviennent de gouverner ensemble, mais c’est là oublier ce qui a donné naissance à Podemos suite aux slogans «ils ne nous représentent pas» du 15M tout comme la nature même du PSOE qui, en dépit des changements réalisés au sein de sa direction, continue à être une pièce de stabilisation du régime de 1978 ainsi qu’une béquille indispensable aux éléments fondamentaux des politiques néolibérales.

mardi 27 juin 2017

Catastrophes naturelles ? – Incendies meurtriers au Portugal : le business de l’eucalyptus et l’austérité européenne accusés

Après le grave incendie de Pedrógão Grande, qui a fait 64 morts ce week-end au Portugal, la population tente de comprendre. Pour João Camargo, spécialiste du changement climatique à Lisbonne, il faut cesser les politiques qui ont conduit, en raison de l’austérité notamment, au démantèlement et à la libéralisation des services publics forestiers.
Les images du violent incendie qui a ravagé pendant plusieurs jours le centre du Portugal cette semaine, à la suite d’un orage sec, ont soulevé beaucoup de questions. Le drame humain sans précédent - 64 morts, plus de 200 blessés - est venu interroger dans la douleur, au milieu des cendres, des voitures calcinées et des corps carbonisés de la National 236, les politiques publiques menées ces dernières années dans un pays régulièrement confronté aux feux de forêt.

mardi 30 mai 2017

Maroc : solidarité avec la mobilisation populaire du Rif , par la Quatrième Internationale (Bureau)

Depuis sept mois un mouvement de contestation populaire ne cesse de croître dans la région du Rif au nord du Maroc, et a culminé par un rassemblement de plusieurs dizaines de milliers de manifestants à Al-Hoceima le 18 mai dernier. 

Ce mouvement prend racine dans la mobilisation populaire qui s’est affirmée dans la région à partir du 20 février 2011, reprenant au Maroc la dynamique des soulèvements dans toute le Maghreb et le Moyen-Orient. Il a été relancé en octobre 2016 lorsque le jeune pêcheur Mohsen Fikri a été broyé dans une benne à ordures à Al-Hoceima. 

mardi 23 mai 2017

Brésil : ébullition et grève, par João Machado et Tarzia Medeiros

Les travailleurs font entendre leur opposition radicale aux mesures gouvernementales sur les retraites et sur le travail. La 28 avril 2017 restera l'un des jours le plus important de l’histoire récente du Brésil. La classe ouvrière a repris son rôle de premier plan sur la scène politique et a protesté de façon unitaire, avec une grève générale, contre les mesures sur les retraites et le travail engagées par le gouvernement illégitime de Temer. 

L’appel pour un jour de grève a été suivi d'un arrêt total ou partiel dans les transports, dans les institutions de l’enseignement, dans des activités économiques de plusieurs capitales et villes. Il a compté sur d'innombrables manifestations et blocages de rue, d’avenues ou importants accès aux centres urbains pendant toute la journée, à commencer par les initiatives de soutien aux chauffeurs de bus et de métro dès l’aube du 28. 

mercredi 17 mai 2017

Grèce : grève générale mercredi 17 mai, par l'Unité Populaire

Le premier mai le gouvernement SYRIZA-ANEL a choisi de donner son accord au quatrième et nouveau mémorandum avec les institutions ! En faisant des « serments » au nom des travailleurs, il a annoncé la suppression du jour de repos dominical et l’ouverture des établissements commerciaux au moins 32 dimanches par an. 

Il a donné son accord pour une nouvelle baisse des retraites, une nouvelle augmentation des cotisations sociales, une nouvelle augmentation de la fiscalité, la levée du véto ministériel concernant les licenciements collectifs, un allongement dans la durée des règlements réactionnaires de la période 2011-2012 concernant les conventions collectives, le rétablissement de l’article 4 pour les grèves et l’aliénation plus grande encore du gouvernement grec. 

mardi 11 avril 2017

Turquie : «La brume ne se dissipera pas de sitôt», entretien avec Uraz Aydin à la veille du référendum

Uraz Aydin a travaillé 17 ans comme assistant de recherche à la faculté de communication de l'Université de Marmara. Il a été licencié par le décret du 7 février 2017, dans le cadre de l'Etat d'urgence pour signature de la pétition Academics for Peace*. Traducteur de Mandel, Bensaïd. Löwy, Traverso, Achcar… il est aussi rédacteur de Sosyalist Demokrasi icin Yeniyol, revue de la section turque de la 4e Internationale. Entretien.

Uraz Aydin

Quelle est l'atmosphère politique actuelle en Turquie alors que le référendum s'approche du 16 avril et que la répression du gouvernement turc contre les forces démocratiques et progressistes s'intensifie?

Laissons tout d'abord parler les chiffres, par ex. le temps de passage à l'antenne des différents partis. Dans les vingt premiers jours du mois de mars, sur 17 chaînes TV Erdogan et divers dirigeants de l'AKP ont bénéficié de 420,5 heures de passage à l'antenne en direct et le HDP… zéro! Entre le 1er et le 22 mars, sur la chaine publique TRT Erdogan et le gouvernement ont eu droit à 4113 minutes de diffusion, le parti républicain de l'opposition CHP 216 minutes, le parti d'extrême droite désormais soumis à Erdogan 48 minutes et le HDP... une minute! Erdogan avait, il y a quelques mois, annulé par décret l'obligation d'égalité du temps de parole à l'antenne des différents partis lors des périodes électorales.

mardi 14 mars 2017

L’écosocialisme est bien plus qu’une stratégie : un projet de civilisation? Entretien avec Daniel Tanuro

Alexandre Araujo Costa : Pendant longtemps, les organisations de gauche n’ont pas accordé beaucoup d’attention aux questions environnementales en général, mais au moins depuis le 15e Congrès, la Quatrième Internationale semble s’inquiéter de plus en plus de la dite «crise écologique». Qu’est ce qui a changé ?
 
Daniel Tanuro : En effet, la plupart des organisations de gauche ont manqué le rendez-vous dans les années 1960, quand la dite « crise écologique » a émergé comme une nouvelle question d’intérêt social général (on peut d’ailleurs fixer une date symbolique de cette émergence : le livre de Rachel Carson, « Le Printemps Silencieux », publié en 1962). La raison principale, je pense, est que ces organisations étaient concentrées principalement sur les guerres et révolutions anticoloniales dans les pays dominés (Cuba, Algérie, Vietnam …), sur les mouvements de masse contre la bureaucratie à l’Est (Pologne, Hongrie) et sur la convergence de la radicalisation des jeunes et des travailleurs en Occident (Mai 68, le « mai rampant italien de 69 »,…).

mardi 21 février 2017

Podemos joue à pierre-feuille-ciseaux, par Pierre Marion (Ensemble!)

Le 11 et 12 février s’est tenu à Madrid le deuxième congrès de Podemos, plus connu sous le nom de Vistalegre II. Après une campagne incertaine et marquée par de fortes tensions entre les deux principaux courants, Pablo Iglesias s’est vue renforcé en obtenant la majorité absolue des voix. Radicalité en externe et pratiques plébiscitaires en interne sont les deux lignes principales de son projet.

La communication occupe une place centrale pour les stratèges du parti violet. Vistalegre II n’a pas échappé à la règle. Héritière d’une tradition marxiste révolutionnaire ouverte, Podemos en Movimiento, la candidature structurée autour d’Anticapitalistas, continue de lever le poing. La candidature d’Iñigo Errejon, a fait, elle, le « V » de la victoire. Représentant d’un « populisme constructiviste profond » selon l’expression de Josep Maria Antentas1, à la recherche d’une certaine normalisation et respectabilité, le « V » est symptomatique d’un secteur qui met en avant les contenus dépolitisant – les signifiants vides d’Ernest Laclau. Au milieu, Pablo Iglesias, a choisi, lui, de brandir une main ouverte en signe de ralliement. Hybridation entre eurocommunisme et populisme instrumental, le courant du secrétaire général oscille entre un côté et l’autre de la balance. Que l’on ait supporté l’une ou l’autre des candidatures, on a donc levé le poing, une main ouverte ou écarté deux doigt pour former un « V » ; ce qui a parfois fait prendre à Vistalegre II des allures de pierre-feuille-ciseaux géant.

lundi 13 février 2017

Podemos face à lui-même, par Josep Maria Antenas (suvi Notes à l'issue du congrès)

Ce week-end a lieu le congrès de Podemos, durant lequel d’importantes décisions vont être prises concernant l’avenir du mouvement. Josep Maria Antentas revient ici sur la trajectoire de Podemos et sur les débats stratégiques qui s’imposent dans la conjoncture présente. 

Josep María Antentas est professeur de sociologie à l’Universitat Autónoma de Barcelone et membre du comité éditorial de la revue Viento Sur.
Le deuxième congrès de Podemos qui est programmé pour les 11 et 12 février, en guise de catharsis interne et externe, condense tous les débats stratégiques du parti qui ont émergé abruptement après l’éclatement de son équipe de direction en mars 2016. La rupture au sommet a rendu visibles les discussions qui jusque-là n’existaient que sous une forme larvée et balbutiante et/ou n’étaient le fait que des minorités critiques qui se sont toujours opposées au modèle de parti et à la stratégie codifiés lors du premier congrès de Vistalegre en octobre 2014. Nous analyserons dans cet article la nature des options internes en lice (pas tant leurs propositions concrètes pour le congrès que leurs positions politiques de fond) et nous dresserons un bilan du modèle de parti adopté à Vistalegre d’un point de vue organisationnel.

vendredi 10 février 2017

Une menace globale – La place du trumpisme dans l’histoire, par Daniel Tanuro

Trump a un projet : gérer les Etats-Unis comme une grande entreprise, transformer celle-ci en forteresse du « capitalisme judéo-chrétien », la restructurer à la hussarde, puis lui rendre une hégémonie mondiale sans partage. Harcèlement du personnel, brutalité avec les concurrents, déni des externalités environnementales sont simplement copiés/collés du niveau de son business à celui de la société. Milliardaire populiste inculte, nationaliste, raciste, sexiste, homophobe, islamophobe, antisémite, Trump ambitionne de remodeler la société US et la carte du monde au marteau, en faisant fi de ce qui existe et en brisant ce qui résiste.

Diverses fractions de la classe dominante suivent les foucades du nouveau Président avec inquiétude. Pourront-elles le canaliser ? Devront-elles s’en défaire ? Les deux options sont ouvertes. Mais une troisième ne peut être exclue : que le boutefeu, par une fuite en avant, fasse basculer le monde dans un cauchemar de guerre et de désastre climatique.

mercredi 1 février 2017

Etat espagnol. Podemos et le Congrès de Vistalegre II : se refonder sans se dénaturer, par Jaime Pastor

«Y advertid, hijo, que vale más buena esperanza que ruin posesión, y buena queja que mala paga», Don Quijote de la Mancha, Miguel de Cervantes [Et prenez garde, mon fils, que mieux vaut bonne espérance que mauvaise possession, et bonne plainte que mauvais payement. Deuxième volume, chapitre 7, traduction billingue, Duke University] 

La tenue prochaine de l’Assemblée de Podemos (10-11-12 février 2017) apparaît comme le moment le plus critique de la brève existence – mais à un rythme accéléré – de Podemos. Cette assemblée se tient alors que l’équipe dirigeante a reconnu que la « guerre éclair » initiée suite aux élections européennes de mai 2014 n’est pas parvenue à remplir son objectif : remporter les élections générales et être en position de gouverner. 

vendredi 27 janvier 2017

Manifestations du 21 janvier aux Etats-Unis : le jour de protestation le plus important de l’histoire américaine, par Socialist Worker

Elles sont venues par centaines et par milliers à Washington, Department of Columbia, remplissant des trains, des cars, des minibus et des voitures. Elles ont recouvert les rues et les parcs d’un torrent d’humanité inondant l’Esplanade nationale [1] afin d’exprimer leur colère et leur tristesse face à l’accession à la présidence de Donald Trump, mais aussi leur bonheur de se retrouver les unes les autres. 

Des scènes similaires se sont reproduites dans les villes et localités à travers tous les Etats-Unis, faisant du 21 janvier le jour de protestation le plus important de l’histoire américaine : plus de 3,3 millions de participant·e·s, si l’on se base sur une tentative de recueillir des informations sur internet de toutes les protestations [cette même source indique comme estimation haute une participation de 4,6 millions] [2]. 

jeudi 26 janvier 2017

L’alliance Trump-Netanyahou, un danger mortel pour la Palestine !

D.Trump à peine installé à Washington, B. Netanyahou, qui n’attendait que cette nomination, annonce la construction de 566 logements à Jérusalem en contradiction totale avec la récente résolution 2334 votée à l’ONU interdisant de nouvelles constructions dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967. 

Et ce n’est qu’un début ! Un plan « ambitieux » est annoncé de construction de 11000 logements à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. 

La politique pro-israélienne annoncée par D.Trump pendant la campagne électorale étasunienne (soutien à la colonisation, projet de transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem correspondant à une reconnaissance implicite quoi qu’illégale de son annexion à Israël) contribuera à enterrer définitivement le processus d’Oslo déjà moribond de création d’un Etat de Palestine à côté d’Israël dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale. 

vendredi 20 janvier 2017

Société Louise Michel : Pour une histoire des lumières arabes. Avec Jean-Pierre Filiu.


Donald Trump, l’Union européenne et le climat, par Pierre Marion

Les preuves du basculement climatique, pour reprendre l’expression de Daniel Tanuro, se font chaque jour plus évidentes. 2016 a battu le record de l’année la plus chaude depuis le début des mesures de la température terrestre1. Dans le même temps, la planète enregistre un recul sans précédent de ses banquises. La couverture mondiale de glace de mer a accusé l’année dernière une perte de plus de trois millions de kilomètres carrés par rapport à la moyenne 1981-20102

Autre indicateur notable, celui du « jour du dépassement global », qui mesure le différentiel sur une année entre les ressources consommées par l’humanité et celle produite par la Terre. Le résultat est clair : en moins de huit mois, l’humanité a consommé la totalité du budget écologique annuel de la Terre3. L’intérêt de cet indicateur est qu’il permet également de souligné les responsabilités différenciées entre pays du Nord et pays du Sud, et au sein de ceux-ci entre classes sociales aisées et classes sociales défavorisées.

lundi 9 janvier 2017

Afrique-du-Sud : la nation arc-en-ciel dans la tourmente, par Jacqueline Dérens

La domination de l’alliance entre l’ANC, la COSATU et le Parti communiste sur la vie politique sud-africaine est en crise. Si l’apartheid a été balayé, l’horizon d’une société égalitaire est contrarié par le règne du néolibéralisme.
L’Afrique du Sud, après avoir suscité un enthousiasme à la hauteur de sa victoire contre le régime d’apartheid, avec un hommage à la limite de l’adoration pour Nelson Mandela, semble aujourd’hui oubliée, sauf pour signaler les frasques de son actuel président. C’est omettre que colonialisme et régime d’apartheid, plus de 350 ans d’une histoire de violence et de mépris, ne s’effacent pas d’un revers de main, ni même par un bulletin de vote. Inégalités, racisme, sexisme sont encore bien là, en dépit des progrès réalisés. Il y a encore beaucoup de montagnes à franchir au pays de Mandela et l’African national congress (ANC) ne semble plus à la hauteur des défis à relever.

dimanche 1 janvier 2017

Grèce .Réfugiés: Illégaux sont les noyades et les camps de concentration et non la désobéissance politique et la solidarité

A l’aube du mercredi 28 Décembre 2016, la police portuaire d’Igoumenitsa (Grèce) a arrêté Mikel Zuloaga et Begonia Huarte, d’ origine basque, parce qu’ ils essayaient de convoyer dans leur mobile home 8 réfugiés vers le pays basque. Leur action s’inscrivait dans le cadre d’une vaste campagne en faveur de la circulation libre des refugiés avec la garantie de conditions de vie dans la dignité; elle s’incrivait aussi que dans la lutte pour une vie sans discriminations ni exclusions sociales. Il s’agit d’un acte de justice. 

Les deux basques détenus à Igoumenitsa affrontent des accusations entrainant des peines lourdes. Six parmi ces refugiés ont été libérés, tandis que les deux autres sont détenus dans des conditions indignes parce qu’ils étaient sans papiers.