jeudi 30 octobre 2014

« L’appel d’Alexis Tsipras pour une Conférence internationale sur la dette est légitime », par Eric Toussaint

 

INTERVIEW d’Éric Toussaint réalisée par Tassos Tsakiroglou (journaliste au quotidien grec Le Journal des Éditeurs) [1]

Tassos Tsakiroglou : Manuel Valls et Matteo Renzi demandent plus de temps pour réduire le déficit, en échange des réformes nécessaires pour que leurs pays deviennent plus compétitifs. Est-ce là un véritable défi pour un consensus sur l’austérité en Europe ? Cela peut-il mener à des résultats positifs ? 

Eric Toussaint : Je pense que la requête qu’ils adressent à la Commission européenne sera rejetée, car cette dernière veut poursuivre les mesures d’austérité brutales au niveau européen, en particulier dans la périphérie (Grèce, Espagne, Irlande, Chypre, Portugal et les pays d’Europe centrale et orientale), mais aussi dans des pays comme la France, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas, l’Autriche et l’Allemagne. Si les gouvernements italien et français arrivaient à persuader la Commission européenne d’abandonner les politiques d’austérité, cela serait positif. Mais c’est impossible, d’autant plus qu’en même temps, F. Hollande et M. Renzi entendent précariser encore un peu plus les travailleurs sur le marché du travail. En Italie, Renzi mène par exemple une attaque contre des conquêtes sociales que Berlusconi n’avait pas réussi à détruire. De plus, nous savons que ce que fait le gouvernement Valls en France est en faveur des grandes entreprises privées et notamment des grandes banques et assurances privées. 

mardi 28 octobre 2014

Russie : Libérez Koltchenko !, par Vincent Présumey


« Notre plus grande erreur, c’est l’oubli de l’internationalisme. » « L’antifascisme n’est pas un crime, libérez l’antifasciste de Crimée, Aleksandr Koltchenko. » Ce sont là des slogans de l’importante manifestation tenue à Moscou contre l’intervention russe en Ukraine le 21 septembre dernier. 

Qui est Aleksandr Koltchenko ? 

Probablement le militant antifasciste le plus célèbre de Crimée. Se réclamant de l’anarchisme, de l’antifascisme, de la défense de l’environnement et de la défense des droits des travailleurs. Ayant diffusé un film sur l’assassinat de la journaliste indépendante criméenne Anastasia Baburova, à Moscou en 2009, il avait déjà été attaqué au couteau par une bande fasciste. 

Lors de l’intervention militaire russe en Crimée répliquant au renversement du président ukrainien Ianoukovtich, Aleksandr Koltchenko a organisé des manifestations pacifiques de protestation contre l’occupation militaire de facto et le référendum truqué, aux côtés de citoyens tatars, ukrainiens, ou russes, notamment le 19 mai dernier à Simféropol. 

mardi 21 octobre 2014

Kobané : "Nous luttons pour toute l'humanité", par Narin Afrin Commandante des Forces de défense des femmes (YPJ)


Codirigeante des Unités de protection populaires, Narin Afrin organise la résistance dans Kobané. Elle lance un appel à la communauté internationale.

« Mon premier devoir en tant que commandante est de démontrer aux femmes qu’elles peuvent s’autodéterminer. Toutes les femmes qui terminent leur formation avec succès sont la preuve que les femmes démentent le fait qu’elles ne peuvent pas combattre. 

Nous ne sommes pas pour les armes, pas pour la guerre et nous ne voulons pas que les gens meurent mais nous n’avons pas le choix. Pour exister, nous combattons contre cette mentalité obscurantiste. 

jeudi 16 octobre 2014

La Tunisie convoque à nouveau la prochaine édition du FSM en mars 2015

C’est le Maghreb qui a demandé de maintenir le lieu « Les mouvements sociaux, acteurs clés » 

La solidarité internationale, plus que jamais indispensable 

Le printemps arabe vit actuellement une phase de frustration et de recul. Dans cette perspective, la prochaine édition du Forum Social Mondial, qui se tiendra de nouveau à Tunis, du 24 au 28 mars 2015, s’avère particulièrement importante. « Cette session est nécessaire dans la mesure où elle permettra, entre autres, d’élever le niveau de conscience des citoyens en vue de se mobiliser davantage pour faire face aux injustices, aux inégalités, et pour la liberté et la dignité des peuples », souligne Mimoun Rahmani, chercheur en économie, membre actif du Forum Social du Maghreb. Rahmani est aussi un analyste politique et social incontournable de la région, militant d’ATTAC-Maroc et membre du groupe de coordination du CADTM Afrique (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde). 

Sergio Ferrari Collaboration de presse d’E-CHANGER/COMUNDO Organisation de coopération solidaire activement présente au FSM. Co-organisatrice des délégations suisses aux FSM. 

Interview de Mimoun Rahmani

mardi 14 octobre 2014

La question kurde en Turquie : une clé de la guerre en cours au Moyen-Orient, par Emre Ongün (Ensemble!)

En Turquie, la violence de la répression envers les manifestants exprimant leur solidarité avec Kobane et contre l’EI (dizaines de morts, plusieurs départements kurdes mis en état de siège) interpelle par sa brutalité même exercée par le gouvernement Erdogan. Pourtant, la Turquie reste un allié des Etats-Unis et de l’UE, et bien qu’il existe une complaisance envers l’EI, celui-ci ne peut être considéré comme un allié à proprement parler du gouvernement turc[1].

Alors comment expliquer cette situation ? La crise provoquée par l’avancée de l’Etat Islamique apparaît autant comme un produit de la crise de l’impérialisme que la cause de son approfondissement. Cela se traduit particulièrement dans l’évolution de la situation au Kurdistan et ses conséquences non seulement Syrie mais également en Turquie, comme le montre la résistance de la mouvance PKK à Kobane (ou selon son nom usuel en arabe Aïn Al-Arab) et les événements qui y sont reliés. 

lundi 13 octobre 2014

Pourquoi le monde ignore-t-il les Kurdes révolutionnaires en Syrie ? par David Graeber

Manifestation à Nantes à l'initiative des associations kurdes
Au sein de la zone où se déroule la guerre de Syrie, une expérience démocratique est en train de se faire écraser par l’État islamique. Que le reste du monde n’en soit pas conscient est un scandale. 

En 1937, mon père s’est porté volontaire pour combattre dans les Brigades internationales pour défendre la République espagnole. Une tentative de coup d’État fasciste avait été temporairement mise en échec par la révolte des ouvriers, dirigée par les anarchistes et les socialistes. Dans une grande partie de l’Espagne une véritable révolution sociale avait suivi, instaurant dans des villes entières une gestion de démocratie directe, mettant les industries sous contrôle des travailleurs et favorisant un renforcement radical du pouvoir des femmes. 

Les révolutionnaires espagnols espéraient créer une société libre qui serait un exemple pour tout le monde. Au lieu de cela, les puissances mondiales ont décrété une politique de « non-intervention », ils ont maintenu un blocus rigoureux à l’encontre de la République, même après que Hitler et Mussolini, prétendument d’accord sur une non-intervention, ont commencé à engager des troupes et à fournir des armes pour renforcer le camp fasciste. Le résultat a été des années de guerre civile qui ont pris fin avec l’écrasement de la révolution et quelques-uns des plus sanglants massacres d’un siècle sanglant. 

dimanche 12 octobre 2014

Guerre au Moyen-Orient. Éléments de discussion, par Francis Sitel (Ensemble!)


C'est bien une nouvelle guerre qui est engagée en Irak et Syrie. Faut-il dire, comme titrait un article de l'Humanité, « une guerre de plus pour Washington » ? Le risque d'une telle formule est de relativiser ce qui se joue, et de tout réduire à la seule dimension impérialiste (états-unien de surcroît). Bref, d'étouffer de dérangeantes interrogations par de sécurisants clichés. 

Or, par guerre on désigne autre chose qu'une opération militaire, même d'envergure. Et qui dit guerre, dit inévitablement grands bouleversements et fortes perturbations. Parce que la guerre provoque de brutales clarifications, et aussi déchaîne désinformation et manipulation, créant confusion et égarements. D'où la nécessité, face à des réalités complexes, voire déroutantes, d'ouvrir des pistes de réflexion, d'assumer la discussion avec ses possibles désaccords.

Est-ce, comme les précédentes, une guerre voulue et orchestré par l’impérialisme ?

mercredi 8 octobre 2014

Syrie. De Kobané à Alep, un horizon ténébreux; une solidarité plus nécessaire, par Charles-André Udry


Les médias internationaux centrent leur attention sur l’offensive des forces dudit Etat islamique (EI) contre la ville de Kobané, territoire kurde en Syrie, proche de la frontière turque. Cette ville, qui comptait par le passé 70’000 habitant·e·s, a reçu des milliers et des milliers de réfugié·e·s des villages environnants fuyant les massacreurs de l’EI. Puis, elle s’est vidée, avec des dizaines de milliers de réfugié·e·s se dirigeant en direction de la Turquie. Avec des hésitations et des difficultés, car la présence de policiers et de l’armée turque rendait épouvantable le passage en Turquie; en particulier pour les jeunes gens, car ce sont des combattants kurdes potentiels pour le pouvoir d’Ankara. 

L’entrée en Turquie – où des camps d’accueil et d’endiguement ont été mis en place – pour une partie de ces familles kurdes (d’origine syrienne) se faisait après une attente plus que pénible et longue, dans ce rude territoire. 

Ce 4 octobre 2014, des centaines de Kurdes, résidant en Turquie (réfugiés ou non), se sont précipités vers la frontière syrienne pour exprimer leur soutien aux milices kurdes de Kobané: ils ont été arrosés de gaz lacrymogènes par la police turque! Le pouvoir d’Ankara voulait établir une «zone tampon» dans le nord de la Syrie pour «protéger» les réfugié·e·s et surtout le territoire turc de leur présence, en tant que Kurdes. 

samedi 4 octobre 2014

Kobanê est en danger, réagissez ! Manifestation en solidarité avec la résistance de Kobanê contre Daesh


Au nom de l’humanité, la France doit soutenir la résistance de Kobanê contre Daesh ! Appel à manifester samedi 4 octobre, Paris 15h, Invalides (sortie métro) - Trocadéro 

Depuis le 15 septembre, les gangs armés de l’Etat islamique (EI ou Daesh en arabe) lancent des offensives sur trois fronts contre le canton de Kobanê, au Kurdistan de Syrie, utilisant des armes lourdes saisies en Irak et en Syrie. Dans le cadre de ces offensives, ils bénéficient du soutien militaire, politique et logistique de la Turquie. 

En échange de la libération de ses 49 otages retenus par l’EI, cette dernière a livré des tanks et des armes aux djihadistes. Les dizaines de milliers de réfugiés qui ont dû fuir devant l’arrivée de l’EI sont amassés le long de la frontière entre la Turquie et la Syrie. 

Avec la population kurde de Turquie qui a massivement afflué à la frontière pour les soutenir, ils sont pris en étau entre les djihadistes de Daesh et l’armée turque. Cette dernière réprime violemment les manifestations et a jusqu’ici tué trois personnes et blessé de nombreuses autres. 

mercredi 1 octobre 2014

Russie, Ukraine : les rouges et verts se mobilisent contre la répression, par Vladimir Claude Fisera


Le 21 septembre dernier à Moscou, un cortège de plusieurs centaines de militants rouges et verts mais aussi libertaires (aux drapeaux noirs et rouges) et féministes (drapeaux violets) a participé à la grande manifestation de la Coalition Antimilitariste de Russie aux cris de "Poutine, assez de baratin, assez de guerre! " et des pancartes portant ces mots : "notre plus grave erreur, c'est l'oubli de l'internationalisme". La banderole de tête portait ces mots : " La guerre, c'est le malheur (biéda), pas la victoire (pobiéda)!"

Plusieurs banderoles proclamaient : "L'antifascisme n'est pas un crime, libérez l'antifasciste de Crimée, Alexandre Koltchenko !". En effet, le 3o mai dernier, après une manifestation le 19 mai à Simféropol en Crimée protestant contre l'occupation russe de la Crimée, quatre militants, Alexandre Koltchenko, Oleg Sentsov,Guennadi Afanassiev, et Alexeï Tchirni, étaient arrêtés en Crimée, enlevés et déportés en Russie dans le plus grand secret sous l'accusation farfelue (dévoilée bien plus tard suite à la protestation d'Amnesty International) d'avoir organisé 2 actes terroristes à Simféropol et d'en avoir planifié un autre.

Le 21 septembre, dans la rue à Moscou contre la guerre en Ukraine - Entretien avec Kirill Buketov


["solidaritéS] a posé trois questions à Kirill Buketov, militant socialiste antiautoritaire russe, après la manifestation anti-guerre du 21 septembre, qui a rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes à Moscou. 

Jean Batou – Etiez-vous nombreux dans la rue le 21 septembre ? Quelles étaient vos revendications ? Quels milieux et forces politiques étaient représentés

Kirill Buketov – Nous avons été surpris par le grand nombre des participant-e-s qui ont exigé que les dirigeants russes stoppent leur intervention militaire en Ukraine, qu’ils cessent la répression et qu’ils libèrent les prisonniers politiques. « Fuck RT ! », les médias manipulateurs sponsorisés par Poutine, était souvent repris en cœur. Socialement très mélangés, les manifestant-e-s représentaient la gauche et les forces démocratiques.