mardi 16 juin 2015
Grèce : le coup d’État ne sera pas télévisé, par Dimitris Alexakis
Les rumeurs d’élections instillées depuis deux jours par les créanciers de la Grèce, l’inquiétude pour les «Grecs qui souffrent» exprimée avant-hier sur les ondes d’une radio française par le président de la Commission (qui a bien pris soin d’ajouter que c’était du «peuple» qu’il se souciait, et non de son «gouvernement»), la récente douche froide de Bruxelles (la délégation hellénique face à des interlocuteurs expliquant qu’ils n’avaient pas mandat pour négocier, l’interruption consécutive de cette réunion au bout de 45 minutes), le report des négociations à la fin juin, la campagne de dénigrement du gouvernement grec orchestrée par le FMI, la Commission européenne et les principaux quotidiens allemands et français («Le Figaro», «Le Monde»), campagne à laquelle le chef de file des sociaux-démocrates allemands vient d’apporter une lourde pierre et dont l’intensité a manifestement franchi un cap depuis deux ou trois jours ― tout cela, combiné à la fuite des capitaux en cours et à l’effondrement de la Bourse d’Athènes, montre que ce à quoi nous assistons aujourd’hui n’est rien d’autre qu’une tentative de coup d’État financier et politique perpétrée contre le gouvernement grec, un gouvernement élu par le peuple il y a un peu moins de cinq mois.
L’objectif semble bien être de faire tomber le gouvernement d’Alexis Tsipras en utilisant le levier de la panique bancaire et, en sapant les fondements mêmes de l’économie du pays, de réduire à néant le soutien politique que le peuple grec continue d’apporter à ses représentants.
Il s’agit d’un coup d’État invisible, sans tanks dans les rues d’Athènes, sans bain de sang, sans images, dans le droit fil de la stratégie insidieuse d’étranglement adoptée par nos «partenaires» dès le 18 février (suspension par la BCE du mécanisme principal de financement des banques grecques), dans le droit fil aussi de la stratégie qui avait conduit ces mêmes partenaires à court-circuiter en 2011 les procédures démocratiques pour placer un banquier et un technocrate (Lukas Papademos, Mario Monti) à la tête des gouvernements grec et italien.
Une tentative de coup d’État que les peuples de l’Union européenne, et le peuple grec lui-même, sont d’ores et déjà invités à cautionner. Ces peuples doivent aujourd’hui prendre conscience que leurs représentants font aujourd’hui tout ce qui est en leur pouvoir pour renverser, au cœur de l’Europe, un gouvernement démocratiquement élu.
Dimitris Alexakis, Athènes mardi 16 juin 2015
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