mardi 8 juillet 2014

"Nous vous demandons de dénoncer sévè­rement les puni­tions col­lec­tives infligées au peuple pales­tinien et de rap­peler au gou­ver­nement israélien son obli­gation de res­pecter le droit inter­na­tional.": lettre ouverte à François Hollande, par Claude Léostic, Taoufiq Tahani, Pierre Tartakowsky


Mon­sieur le Pré­sident, 

Nous, asso­cia­tions de défense des droits de l’Homme condamnons sans réserve les assas­sinats des trois jeunes Israé­liens retrouvés près d’Hébron le 30 juin 2014 et du jeune Pales­tinien à Jérusalem-​​Est le 2 juillet 2014. Nous sommes par­ti­cu­liè­rement inquiets de l’intensification des attaques contre des civils dans le Ter­ri­toire pales­tinien occupé par les forces israé­liennes et du climat de haine qui s’installe en Israël à travers notamment des « appels à tuer les Arabes ». L’opération mili­taire israé­lienne dite « Gar­diens de nos frères » lancée quelques jours après la dis­pa­rition des trois jeunes Israé­liens le 12 juin dernier, avait pour objectif officiel de les retrouver. Les moyens déployés par la puis­sance occu­pante pour ce faire se sont rapi­dement révélés dis­pro­por­tionnés. Au lieu d’une enquête métho­dique, une vio­lente cam­pagne de répression a été lancée en Cis­jor­danie. 


A l’heure actuelle, le bilan est très lourd : 12 Pales­ti­niens ont été tués, dont 9 civils. Environ 120 Pales­ti­niens ont été blessés. Au moins 640 per­sonnes ont été arrêtées à travers toute la Cis­jor­danie, dont 250 membres du Hamas, ainsi que 23 par­le­men­taires et de très nom­breux enfants. Plus de 1 200 maisons et bureaux ont été sac­cagés lors de raids, les ter­rains agri­coles déli­bé­rément ravagés lors des para­chu­tages. Les maisons des familles de deux Pales¬ti-niens « déclarés cou¬pables » de l’enlèvement – sans que la preuve en ait été apportée – ont été immé¬dia¬tement démolies. Deux ten­ta­tives d’enlèvement d’enfants pales­ti­niens par les colons – dont une réussie - ont eu lieu à Jéru­salem Est. Des colons en voiture ont essayé d’écraser des Pales­ti­niens près d’Hébron - dont une enfant de 9 ans. Paral­lè­lement, les bom­bar­de­ments se sont inten­sifiés sur la bande de Gaza vers laquelle convergent des unités au sol, et trois avant-​​postes illégaux ont été établis par des colons en zone E1. L’assassinat de ces trois jeunes Israé­liens ne peut jus­tifier la punition col­lective infligée au peuple pales­tinien. 

Nous sommes très pré­oc­cupés par la mul­ti­pli­cation des appels à la « ven­geance » lancés par de nom­breux res­pon­sables poli­tiques israé­liens, dont le Premier ministre Ben­jamin Neta­nyahou qui a déclaré lundi 30 juin que « la ven­geance pour le sang d’un ado­lescent ou d’un jeune homme n’est pas un travail du diable ». Le ministre du logement Uri Ariel a appelé à « com­mencer une vague de construction dans les colonies en réponse au meurtre des kid­nappés ». Le ministre de l’économie Naftali Bennett a déclaré que « les assassins d’enfants et ceux qui les dirigent ne peuvent être par­donnés. Il est temps de passer à l’action, pas aux mots ». 

Cet appel à la ven­geance semble avoir été entendu, ainsi, mer­credi 2 juillet, à l’aube, un jeune Pales­tinien a été enlevé et tué à Jérusalem-​​Est. Ce recours excessif à la force contre des civils pales­ti­niens par l’armée israé­lienne doit être offi­ciel­lement et clai­rement condamné par la France au plus haut niveau. 

Toute punition col­lective est une vio­lation grave du droit inter­na­tional, notamment de la qua­trième Convention de Genève relative à la pro­tection des per­sonnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949. Il est néces­saire de rap­peler que depuis 2000, 1 406 enfants pales­ti­niens et 129 enfants israé­liens ont été tués. Trois mineurs pales­ti­niens ont été tués depuis le début de cette vio­lente cam­pagne de répression. Ce décompte macabre ne suscite ni condam­nation ferme et offi­cielle, ni message de soutien aux familles de la part des Etats amis d’Israël en général, et de la France en par­ti­culier. 

La France, en tant que Haute Partie contrac­tante à la qua­trième Convention de Genève a l’obligation de res­pecter et de faire res­pecter la Convention en toutes cir­cons­tances (article 1) et de prendre toutes les mesures néces­saires pour pour­suivre les per­sonnes ayant commis, ou donné l’ordre de com­mettre des infrac­tions graves à la qua­trième Convention de Genève (article 146). 

Dans ces cir­cons­tances, nous vous demandons de dénoncer sévè­rement les puni­tions col­lec­tives infligées au peuple pales­tinien et de rap­peler au gou­ver­nement israélien son obli­gation de res­pecter le droit inter­na­tional. S’il ne s’y conforme pas, d’adopter toute mesure ferme et per­ti­nente pour mettre un terme à ces crimes. C’est éga­lement dans ce contexte que nous sol­li­citons auprès de vous un rendez-​​vous afin que vous puissiez nous com­mu­niquer la position de la France. 

Dans l’attente de votre réponse et dans l’espoir que vous ferez suite à notre demande, nous vous prions d’agréer, Mon­sieur le Pré­sident, l’expression de notre haute consi­dé­ration. Nous vous informons par ailleurs que nous ren­drons cette lettre publique et que nous adres­serons une copie à Mon­sieur Laurent Fabius, ministre des Affaires étran­gères et du Déve­lop­pement international. 

Claude Léostic Présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine 
Taoufiq Tahani Président de l’Association France Palestine Solidarité 
Pierre Tartakowsky Président de la Ligue des droits de l’Homme France

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