lundi 4 août 2014

Gaza : «Nous avons franchi une étape morale avec l'attaque de l'école». Entretien avec Salvatore Lombardo (UNRWA)


Depuis le début de l’offensive israélienne sur Gaza, le 8 juillet, Tsahal a plusieurs fois pris pour cible des bâtiments onusiens, entraînant des condamnations de toute part. Dimanche, une école gérée par l’ONU, dans laquelle de nombreuses femmes avec leurs enfants avaient trouvé refuge, a été détruite, suscitant l’émoi de la communauté internationale. Salvatore Lombardo, responsable de la communication extérieure de l'Agence des Nations unies pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA), répond aux questions de Florence Thomazeau (RFI). 

RFI : Aujourd’hui, on est au-delà de la condamnation. Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies, parle d’un « acte criminel ». Est-ce qu’une nouvelle étape a été franchie ? 


Salvatore Lombardo : Oui. Nous sommes dans une situation humanitaire à Gaza qui se trouve presque au bord d’un précipice avec presque un demi-million de personnes déplacées dont 260 000 qui se trouvent dans 90 écoles de l’UNRWA, dans des conditions d’hygiène et des conditions générales assez difficiles. Nous avons franchi une étape morale très importante avec cette sixième attaque, même si cette fois c’était seulement près de notre école et qu' il ne s’agissait pas d’une attaque directe. C’est un acte que nous condamnons très fortement. Nous trouvons absolument inacceptable que dans les conditions dans lesquelles nous nous trouvons, il soit encore possible que des civils qui se trouvent à l’intérieur d’une école des Nations unies puissent trouver la mort et parmi lesquelles d’ailleurs beaucoup d’enfants. On parle de désastre humanitaire. Les frappes évidemment visent ces civils. Ces civils qui sont dans une situation désespérée au niveau alimentaire, au niveau de l’eau. 

Il y a des problèmes d’alimentation en eau à Gaza ? 

Oui, bien sûr, parce qu'avec les frappes, les infrastructures ont été sévèrement touchées, dont la centrale électrique. Nous sommes en train d’assister d’ailleurs beaucoup d’édifices publics avec d’abord de l’essence, et surtout avec des générateurs pour permettre, par exemple, aux boulangeries de pouvoir produire du pain. Donc le manque d’électricité a eu aussi des conséquences sur la distribution de l’eau car les canalisations ont été touchées. Il y a une très grande partie de la ville qui se trouve sans eau et il y a des problèmes d’hygiène assez importants partout. 

Une enclave qui souffre aussi plus du blocus ? 

Le blocus malheureusement est là depuis sept ans. Ça reste le problème de fond dans cette situation. Les bombardements visent depuis plusieurs jours des mosquées, des écoles, des sites onusiens. 

L’argument d’Israël, c’est que le Hamas cache des armes dans ces lieux et se sert de la population comme boucliers humains. Partagez-vous ces positions ? 

C’est un problème dans lequel nous étions assez transparents, nous étions d’ailleurs les premiers à parler de ça, car nous avons eu trois écoles où il n’y avait pas de déplacés, et dans lesquelles nous avons trouvé des caches d’armes. Nous étions très actifs et nous avons dénoncé cela publiquement. Et nous avons rappelé aux belligérants de respecter nos écoles. Toutefois, on ne peut pas, pour l'instant confirmer que c'est à cause de ces armes qu'il y a des frappes qui touchent des civils. 

Mais nous nous demandons pourquoi six fois de suite, en l’espace de trois semaines, les principes du droit international en matière de guerre n’ont pas été respectés ? Pourquoi en l'espace de trois jours, on a le même incident ? Pourquoi dans les activités militaires, les Israéliens ne tiennent pas compte de cela ? Nous condamnons à la fois le fait d'utiliser nos écoles pour cacher des armes et que des civils y perdent leur vie. 

Mais comment pouvez-vous garantir l’inviolabilité des écoles de l’ONU ? 

Par exemple, dans le cadre de l’école de Rafah, nous avons communiqué 33 fois aux autorités militaires israéliennes l’endroit où se trouvait l’école. C’est la première façon de s’assurer que les belligérants ont la connaissance de l’endroit où se trouvent les civils. Et nous leur demandons naturellement de respecter cela. 

Est-ce qu’il y a un dialogue qui s’établit entre Israël et l’ONU, parce qu’on a l’impression d’un dialogue de sourds ? 

Absolument, et c’est un dialogue positif et transparent . Et comme je viens de vous le dire, nous avons donné les coordonnées de nos écoles et obtenu que l’aide humanitaire puisse parvenir dans la bande de Gaza aux Palestiniens, ce que les Israéliens ont garanti jusqu’à maintenant.

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