mercredi 21 mai 2014

Tafta : briser la loi du silence, c’est parti ! , par Flavia Verri (Ensemble)


L’accord de libre-échange entre les Etats-Unis et l’Union européenne fait face à une vague d’hostilité croissante en Europe où il s’est imposé comme un thème important de la campagne européenne. Alors que le cinquième cycle des négociations se tient jusqu’au 23 mai à Arlington (Virginie), les initiatives se multiplient pour dénoncer son contenu et demander la transparence. 

La secrétaire d’Etat au commerce extérieur, Fleur Pellerin, s’est même sentie obligée de proposer de rendre public le mandat de négociations des commissaires européens. Sauf que le texte a en fait déjà fuité sur internet ! Elle a aussi appelé à « dédramatiser » le Tafta. Ce n’est pourtant pas le message reçu lors de la manifestation du 15 mai à Bruxelles face au European Business Summit, puisque plus de 250 manifestant.e.s pacifiques ont été arrêtés pour avoir simplement exprimé publiquement leur opposition au Tafta. 


Pour contribuer à sortir ces négociations de l’ombre, les députés du Groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR-Front de Gauche) à l’Assemblée nationale ont déposé début mai une Proposition de résolution européenne dont la version initiale invitait « le gouvernement français à intervenir auprès de la commission européenne afin de suspendre les négociations sur le projet de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis ». Cette proposition débattue à l’Assemblée le 22 mai, soit trois jours avant les élections européennes et pendant le nouveau cycle de négociations, a été complètement vidée de son contenu. 

Les députés ont travaillé le document en commission et la députée PS Estelle Grenelier a méthodiquement édulcoré le texte originel. La « suspension des négociations » s’est transformée en un simple exercice de vigilance ; la « fin du système d’espionnage [de la NSA] » devient la nécessité de la « protection de données personnelles » ; le « retrait des négociations de la clause relative au mécanisme de règlement des différends » est remplacé par une phrase se satisfaisant de la consultation sur le sujet lancée par la commission européenne. La version finale est tellement différente de la version initiale que le Groupe GDR va devoir s’abstenir lors du vote global. L’Assemblée adoptera alors une résolution européenne avec l’étiquette « Groupe GDR » mais avec un contenu qui n’a rien pour plaire ! 

Le collectif national Stop Tafta compte bien se saisir de cette occasion pour interpeller le gouvernement : demander à connaître toutes les positions qu’il défendra dans les mois à venir au sein du conseil européen et questionner sur quels engagements il prendra pour garantir la transparence de ses travaux et le débat démocratique concernant le projet d’accord. 

Le collectif s’est aussi engagé à soutenir la Plateforme européenne anti-Tafta qui a été lancée ce 21 mai de manière coordonnée et simultanée partout en Europe. Cette plateforme est une déclaration commune d’une coalition de plus de 120 groupes européens - de défense de l’environnement et des consommateurs, issus de mouvements sociaux, de syndicats … - qui s’opposent aux aspects inacceptables du projet d’accord aussi bien que du processus de négociation. 

La publication de ce document coïncide avec une journée d’action à Arlington où se déroulent les pourparlers. La coordination d’actions transatlantiques commence en effet à se construire. Une première rencontre a eu lieu à Bruxelles à la mi-mars et une journée de mobilisation transatlantique à l’horizon de 2015 est envisagée. 

Côté européen, des dizaines de milliers de personnes ont participé aux premières journées de la semaine de mobilisation « Solidarité au-delà des frontières » du 15 au 25 mai pour s’opposer à la Troïka, aux politiques d’austérité et au Tafta. A cette occasion se sont déroulées plusieurs initiatives le samedi 17 mai dont la marche festive et le village des alternatives à Paris. 

Une nouvelle journée européenne de mobilisation décentralisée est à nouveau prévue pour le mois d’octobre 2014, à l’occasion d’un nouveau cycle de négociations à Bruxelles. La prise de position d’IG Metall contre le Tafta pourrait peser en faveur de l’implication de certains secteurs de la CES dans la campagne … 

En France, il s’agit d’entraîner une vague de collectivités territoriales à se déclarer zone hors-Tafta et de pousser les communes favorables à le faire. Parallèlement, la mobilisation se construit au sein du collectif national et des nombreux collectifs locaux qui déploient mille et une idées pour expliquer les dangers du Tafta. Un théâtre-forum, un défilé sur un marché avec une vache ou des poules « non chlorées », une « manifestation de droite » demandant plus d’OGM, du gaz de schiste, la suppression des génériques et des logiciels libres : les collectifs sont plein d’inventivité ! Il ne reste plus qu’à les démultiplier ! 

Contre le Tafta on ne lâchera pas ! 

Flavia Verri

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